Toute peine est immorale qui respire la vengeance sans respirer la charité.
Les hommes se détestent et s'estiment quelquefois en même temps ; les femmes se haïssent cordialement, mais ne s'estiment jamais.
Un amour-propre excessif ne détruit pas les bonnes qualités, mais il les gâte.
Quand une chose pénible vous est arrivée, prenez pour l'avenir des précautions contre la cause dont l'effet a été défavorable. Pour la plupart des gens, un retour à la prospérité leur fait oublier l'infortune, et leur raison devient sourde aux avertissements que le ciel leur donne.
Qu'est-ce que le temps ? Toujours futur ou passé. Dès qu'il est présent, il n'est déjà plus.
On ne peut jouir longtemps des plaisirs sans dégoût, ni se priver d'eux sans contrainte.
On perd bien des occasions de réaliser de bonnes affaires quand on est trop défiant, et l'on en fait souvent de très mauvaises quand on est trop crédule.
L'affectation sied à peu de femmes, et n'est supportable en aucun homme.
C'est s'exposer à manquer à sa parole que d'être trop facile à la donner. Mille circonstances imprévues peuvent empêcher de la tenir.
Il est dangereux de trop prévoir comme il est dangereux de ne pas prévoir assez.
La vanité a des retours infinis : elle reparaît par les mêmes sentiments qui avaient servi à la dissiper.
L'ambition et la cupidité ont les mêmes vices et se rendent coupables des mêmes crimes.
La naissance est un avantage dont nous devons profiter pour ajouter à la gloire de nos aïeux, et non pour parer notre nullité.
Les hommes esclaves de l'opinion publique sacrifient chaque jour des êtres qu'ils estiment aux principes de gens qu'ils méprisent.
La corruption des mœurs provient le plus souvent de deux situations extrêmes : d'une grande richesse ou d'une grande infortune.
Le mépris qu'on affecte pour ce qui est estimable laisse toujours un remords dans le cœur.
La pudeur doit étendre son voile sur les douceurs comme sur les contrariétés du mariage.
L'homme de mérite, qui sait apprécier ce qu'il vaut et place sa confiance en Dieu, conserve dans l'infortune toute la dignité de soi.
On ne doit pas plus compter sur la probité d'un joueur que sur la continence d'une courtisane.
Être soumis aux lois, c'est assurer sa liberté, car les lois sont l'arme de tous pour résister à l'esclavage.
Il ne faut pas toujours se presser d'apprendre à ceux qui l'ignorent tout le mal que d'autres pensent de nous.
Les illusions sont les berceuses de l'homme et la vérité est pour lui ce que le pédant est pour l'écolier.
Personne ne saurait nous enlever l'honneur, c'est nous qui le perdons.
C'est presque toujours malgré lui qu'un homme en estime un autre.
L'histoire du passé est féconde en enseignements pour se mettre en garde contre l'avenir ; mais les hommes apportent toujours, dans l'administration publique, l'inconséquence et l'aveuglement qui leur sont habituels dans leur vie privée.
Avec de la haine, on n'est jamais ni juste ni vrai envers l'objet qui la cause.
La gloire est comme la fortune, elle vient quelquefois chercher celui qui ne songeait point à elle.
Le génie rend la passion vivifiante et profitable : la passion sans génie est un fléau.
La fortune, qui souvent se prostitue, a aussi le sort d'une courtisane ; on feint de la mépriser lorsqu'elle n'accorde point ses faveurs, et certaines dupes prennent cette affectation pour de la vertu.
Pour donner de bons exemples, il faut savoir profiter des mauvais.
Dans une lutte d'esprit, la haine du vaincu accompagne presque toujours le succès du vainqueur.
En ce qui touche les choses d'ici-bas, il y a plus d'enivrement à espérer que de félicité à obtenir.
L'envie est comme le vautour de Prométhée : elle déchire sans relâche celui qui la renferme dans son sein.
L'enfant juge d'après ses sens ; l'homme sur l'ensemble de quelques idées. Il y a à parier que, pour une foule de choses, l'enfant approche plus de la vérité que l'homme.
Une connaissance approfondie des hommes conduit toujours à l'égoïsme : on ne se croit obligé à rien avec l'envieux et l'ingrat.
L'école enseigne à parler, mais non pas à vivre.
Trouvez seulement trois personnes pour leur faire accueillir une absurdité, et celle-ci se présentera bientôt en un fait grave à la controverse d’un million de gens.
Il n'y a point de bœuf dont le travail soit plus laborieux que celui d'un courtisan, ni de valet dont la servilité soit plus grande.
Celui que vous aurez laissé parler longuement sans l'interrompre ne manquera pas de vous tenir pour une personne d'esprit et de sens.
Les grands donneurs d'avis sont ceux qui en accueillent le moins.
Le cœur perfectionne les idées.
On réforme les actes, mais on ne change le caractère.
Il est des hommes, mais en petit nombre, qui trouvent dans le bien qu'ils font, la récompense de celui qu'ils ont déjà fait.
Les grands conteurs sont de petits esprits.
L'avare ne raisonne point et ne forme aucun projet d'avenir. Il n'est en proie qu'à une unique pensée, celle d'entasser argent sur argent. Il n'a communément d'autre vice que sa manie ; mais aussi il est complétement dépourvu de vertus, même de l'amour de la famille.
Heureux celui qui trouve dans le rêve de l'avenir la consolation des maux du présent.
Il n'y a point d'athées, il n'existe que des fanfarons qui n'osent pas avouer l'admiration et la crainte que Dieu leur inspire.
C'est aux deux extrémités de la vie qu'on est le plus sensible à l'amitié.
L'ambitieux n'a ni patrie, ni famille, ni cœur, ni âme.
Avouer un défaut, c'est éviter qu'on nous le reproche.
La critique révolte ou décourage les hommes de lettres. Cependant, si elle est juste, ils n'ont que du profit à en tirer ; et si elle ne l'est pas, elle ne saurait leur nuire.
Ne crois jamais à un temps constamment serein : l'orage se déclare au moment où on ne l'attend pas, et il est sage de se prémunir contre lui.
Quand on a la prétention d'être toujours indépendant, on est déjà soumis à une sottise.
On passe la moitié de sa vie à regretter l'emploi de l'autre moitié.
Employer la raison pour discuter avec un bel esprit, c'est faire usage d'une langue qui lui est inconnue.
La prudence n'est le plus souvent qu'une précaution de l'égoïsme.
L'affabilité des grands est la plus gracieuse, mais elle est la moins sincère.
En général, la raillerie nous affecte davantage que la médisance.
C'est parce qu'un sot ne se doute pas de son ignorance qu'il croit tout savoir.
La vie est longue pour celui qui compte les heures, elle est courte pour celui qui les oublie.
On meurt chaque jour, le temps s'empare sans relâche d'une portion de notre existence.
En général, un homme cesse d'aimer lorsqu'il a obtenu ; l'affection d'une femme augmente lorsqu'elle a accordé.
Qui a une mémoire remarquable des mots a rarement une heureuse compréhension des choses.
La pudeur la plus farouche est la pudeur d'emprunt.
Le courage examine ; la témérité est aveugle.
La sagesse est un bien qu'aucune puissance ne peut nous enlever sans notre consentement.
La crainte exagérée du ridicule ne conduit qu'à façonner de petits esprits.
Dans le monde, on prend les choses pour ce qu'elles se donnent ; dans la retraite, on les apprécie pour ce qu'elles valent.
C'est dans la vie retirée qu'on rencontre la situation la plus heureuse, on y a moins d'envieux.
On demande sans cesse le repos, et dès qu'on l'obtient il fatigue.
L'habitude l'emporte toujours sur le sentiment.
La morale n'est point un sentiment inné, c'est une lumière acquise.
L'expérience du monde, c'est la destruction des plus doux rêves.
La modestie est au talent ce que la pudeur est à la beauté.