Deux grandes catégories d'esprits incompatibles : Les esprits que pressent les nobles curiosités, et les esprits qui s'amusent aux curiosités vulgaires. Les uns veulent connaître le système sidéral et les mystères de l'âme ; ils interrogent Newton, Leibnitz ou Spinoza. Les autres se demandent comment il se peut faire que le voisin soutienne de si grosses dépenses ou que la voisine n'ait point encore marié sa fille. Ils questionnent les portiers et les femmes de chambre. La plus aisément satisfaite de ces deux catégories d'esprits ne me semble pas néanmoins la plus enviable.
Les beaux esprits se rencontrent, dans une sottise, oui plus d'une fois.
Les esprits solides, bâtis à chaux et à sable, vont diminuant de jour en jour. On ne fait plus guère les esprits qu'à pierres sèches, avec maintes doctrines futiles, ce pourquoi ils croulent au premier coup de vent.
Ce qui manque aux petits esprits ce sont les idées ; aux grands esprits, ce sont les mots.
Il ne faut pas croire que l'art des citations soit à la portée de tous les petits esprits qui, ne trouvant rien chez eux, vont puiser chez les autres. C'est l'inspiration qui donne les citations heureuses.
Jusqu'à ce qu'on rencontre le secret de rendre les esprits plus justes, tous les pas que l'on pourra faire dans les voies de la vérité n'empêcheront pas les hommes de raisonner faux, et plus on voudra les pousser au-delà des notions communes, plus on les mettra en péril de se tromper.
Pour les esprits superficiels (ce sont, hélas ! les plus nombreux) un vice à la mode devient pour le moment une vertu.
Il en est de certains esprits comme des toupies qui n'entrent en mouvement que sous un coup de fouet.
Que d'esprits ont la vue basse. Ce sont des myopes pour lesquels un opticien devrait bien inventer des lunettes. Il y en a même de tout à fait aveugles. À ceux-là il faudrait faire subir l'opération de la cataracte intellectuelle. Mais s'y soumettraient-ils ? Leur cécité leur est si chère !
Ce sont toujours les esprits les plus sujets aux préventions qui sont les plus sujets aux engouements.
Les nez tordus sont des esprits faux.
Les grands esprits, dit-on, se rencontrent. Et les petits aussi, et plus souvent !
Les esprits qui ont peu d'idées, mais qui en sont maîtres, acquièrent par-là de l'ascendant sur les esprits que leurs idées gouvernent et tourmentent.
Il y a des esprits faux de naissance ; comme les yeux, l'esprit a son daltonisme.
Les esprits étroits sont naturellement entêtés : l'idée nouvelle a autant de peine à y entrer que l'ancienne à en sortir.
Les esprits pleins de chimères sont malsains comme les brouillards.
Il est des esprits, comme des liquides, qu'on clarifie pas.
Il y a des esprits pénétrants à qui leur pénétration ne sert de rien.
Les beaux esprits se rencontrent.
Les esprits ordinaires font leur chemin plus facilement que les grands, les pieds moyens trouvent chaussure toute faite.
La mystification est la ressource des petits esprits.
Les esprits faux sont d'un métal rigide et fragile, on les brise, on ne les redresse pas.
Les esprits faux ont naturellement beaucoup d'idées.
Il est des esprits de la nature des laquais : leur pensée marche toujours derrière la pensée des autres.
Les esprits opaques ont de loin en loin des clartés incommodes.
Les esprits légers déferont demain le mal qu'ils ont fait hier.
Les esprits forts sont comme les gens ivres, qui veulent toujours faire boire ceux qui sont de sens froid.
Lorsque la vieillesse appesantit les esprits on ne fait plus que raisonner sur le passé.
Les esprits doux et conciliants sont, plus que tous autres, faits pour gouverner le monde.
Les petits esprits n'aiment guère qu'à parler d'eux-mêmes : c'est le sujet qu'ils possèdent le mieux et sur lequel ils trouvent le moins de contradiction.
Il y a des esprits si singuliers qu'ils font des mystères des choses les plus indifférentes.
Il y a les esprits obtus et les esprits obturés.
Les esprits perspicaces savent fort bien dégager les nuances des différences.
Les esprits bien faits, vifs, lucides, avisés, éclairés, sont chose rare.
Les esprits absolus sont des esprits étroits qui ne voient qu'un côté des choses.
Le désordre dans les rues est le moins grave ; le plus grave, c'est le désordre dans les esprits.
La conversation des esprits supérieurs est inintelligible aux esprits médiocres.
Il n'y a pas de gens plus méprisables que les petits esprits, et les grands sans probité.
Les mauvais esprits gâtent la piété, mais l'impiété gâte les meilleurs esprits.
Il est de certains esprits comme certaines fleurs qui entêtent.
Les beaux esprits sont comme les roses : une seule fait plaisir, un grand nombre entête.