Le bonheur lui-même cesserait d'être le bonheur si nous n'étions pas deux pour en jouir.
Pourquoi nous tourmenter par une jalousie sans motif, par de ridicules caprices et de folles lubies, dans le seul but de rendre notre amour maladif ?
Hélas ! l'amour des femmes, on le sait, c'est une chose à la fois charmante et redoutable ; toute leur destinée est placée sur cette carte unique ; si elles perdent, la vie n'a plus à leur offrir que le spectacle dérisoire du passé, et leur vengeance est comme le bon du tigre, mortelle, prompte, écrasante ; elles ressentent, de leur côté, des tortures non moins réelles ; ce qu'elles infligent, elles l'éprouvent.
Ceux-là même qui désespèrent du ciel se créent sur la terre des illusions, tige fragile à laquelle ils se rattachent comme des hommes qui se noient.
La société n'est qu'un jeu où chacun a des intérêts distincts et un plan à suivre.
Les épines que j'ai recueillies proviennent de l'arbre que j'ai planté. Elles m'ont déchiré, et je saigne. J'aurais dû prévoir quel fruit naîtrait d'une telle semence.
L'argent comptant est la lampe d'Aladin.
On commence la vie avec des sentiments chaleureux, des espérances magnifiques ; mais le temps décolore peu à peu nos illusions, et, comme le serpent, tous les ans quelque insigne méprise dépouille sa peau brillante.
Il suffit à la foule de la vue du sang pour lui en donner la soif, comme la première coupe de vin est le prélude d'une longue débauche.
Les femmes sont des anges, sans doute, mais c'est le diable que l'hymen.
Lorsqu'on ose tenter le destin, il abandonne la plus haute étoile.
Sois circonspect, épie le moment propice, et mets-le toujours a profit.
Dans leur développement les rêves respirent ; ils ont des larmes, des tourments, et sont susceptibles de joie ; ils laissent un poids sur les pensées de notre réveil, ils enlèvent un poids aux fatigues de notre veille.
Les gens les plus nuls sont aussi les plus vains.
Un livre nouveau est pour moi un trésor, mais il faut qu'il soit véritablement nouveau : or, comme j'ai lu considérablement, plus peut-être qu'aucun homme de mon âge, il ne me faut pas longtemps pour voir si un ouvrage est un non-sens, une variante ou un plagiat volontaire, et, dans ce cas, je rejette le livre avec dégoût.
Les femmes maigres, quand elles sont jeunes et jolies, elles me font l'effet d'un papillon desséché à la lumière ; celles qui ne sont ni jeunes ni jolies me font l'effet d'araignées dont les toiles ne m'attraperaient jamais si j'étais mouche, car elles n'ont rien d'attrayant !
L'esprit humain est comme un homme ivre à cheval ; si vous l'attachez d'un côté de la selle, il penchera de l'autre.
Plus nous cherchons à nous expliquer les anomalies et les contradictions qui existent en nous et dans les autres, plus nous les trouvons incompréhensibles.
Les gens les plus heureux semblent être ceux qui réfléchissent le moins.
La différence qu'il y a entre un homme pieux et un impie, c'est que l'un sacrifie le présent à l'avenir, et l'autre l'avenir au présent.
Si je ris des choses mortelles, c'est pour ne pas en pleurer.
L'amitié est l'amour sans ailes.
Il faut avoir l'esprit bien étroit, le cœur bien froid pour se contenter du présent : il n'y a pas jusqu'aux personnes livrées sans relâche aux plaisirs du monde, qui n'aient encore besoin d'avoir à désirer, à espérer quelque chose pour le lendemain de leur vie, tant l'aujourd'hui du présent est insuffisant pour nous remplir l'âme !
Mon beau idéal, à moi, c'est une femme qui ait assez de talent pour comprendre et apprécier le mien, mais pas assez pour briller elle-même à mes dépens. Tous les hommes qui ont quelque fierté rêvent le même idéal ; il y en a bien peu, s'il y en a, qui aient le courage de l'avouer.
La passion amoureuse éteinte ne peut se remplacer par aucun sentiment d'amitié.
L'indifférence appelle naturellement l'indifférence.
Il faut savoir endurer ce qu'on ne peut guérir.
L'amitié peut bien tourner en amour, mais l'amour ne devient jamais de l'amitié.
Le souvenir du bonheur n'est plus du bonheur; le souvenir de la douleur est de la douleur encore.
Le passé, du futur est le meilleur prophète.
J'ai connu le courroux des femmes et des flots, et je plains les amants plus que les matelots.
Croire une femme ! autant vaut croire une épitaphe.
Les années font place aux années ; les siècles suivent les siècles.
L'âme immortelle récompense ou punit elle-même ses pensées vertueuses ou coupables ; elle est tout à la fois l'origine et la fin du mal qui est en elle.
Ami, pourquoi te plaindre des dédains de cette demoiselle ? Pourquoi te désespérer ? Essaie des mois entiers, si tu veux, la puissance des soupirs ; mais, crois-moi, jamais les soupirs ne triomphent d'une coquette. Veux-tu lui apprendre à aimer ? Feins quelque temps d'être volage. D'abord, il est possible qu'elle te témoigne de l'humeur ; mais laisse-la faire, bientôt tu la verras te sourire, et tu obtiendras tout de ta coquette. Car ce sont là les airs de ces belles capricieuses. Elles regardent notre hommage comme une dette ; mais en les délaissant un peu, on les ramène, et on fait baisser pavillon à la plus orgueilleuse coquette.
Si pourtant un faux orgueil lui faisait dédaigner tes tourments, oublie, crois-moi, cette capricieuse ; adresse tes hommages à d'autres, qui partageront ta flamme et riront de la petite coquette.
Quitte-la, mon ami ! Défends ton cœur, avant que tu sois tout-à-fait dans ses rets : n'attends pas qu'en ton âme, profondément blessée, l'indignation te fasse maudire la coquette.
Je ne puis plus faire entendre à Marie mes doux serments, Marie, autrefois si chère à mon amour ; mais je me rappelle l'heure où à l'ombre d'un bosquet, ces serments, elle les paya d'une larme.
Un autre possède ma tendre et douce ! Puisse-t-elle être heureuse ! Mon cœur continuera à révérer son nom. Je renonce en soupirant à ce cœur que je croyais à moi, et lui pardonne son parjure, mais non sans verser une larme.
Le cœur d'une femme est une partie des cieux, comme le firmament, il change nuit et jour.
La beauté gagne quelquefois à être regardée de loin.
Quand mon âme prendra son vol vers les régions de la nuit, quand mon corps sera couché dans son cercueil, s'il vous arrive de passer devant la tombe qui recouvrira mes cendres, ô mes amis, mouillez-les d'une larme !
Ô vous, amis de mon cœur, avant que nous nous séparions, laissez-moi exprimer un espoir qui m'est bien cher : Si jamais nous nous retrouvons ensemble, dans cette retraite champêtre, puissions-nous nous revoir comme nous nous sommes quittés, avec une larme !
Lieu cher à mon adolescence, séjour d'amitié et de franchise, où l'année fuyait si vite devant l'amour ; en te quittant j'avais la tristesse au cœur ; je me retournai pour te voir encore une dernière fois, mais je n'aperçus ton clocher qu'à travers le voile d'une larme.
L'homme qui s'abandonne au souffle des vents, et traverse les flots orageux de l'Atlantique, se penche sur la vague qui bientôt peut-être sera son tombeau ; une larme brille sur la verte surface.
C'est à une ardente charité qu'on reconnaît une âme compatissante ; alors que la pitié se manifeste, elle répand sa douce rosée dans une larme.
Le sourire n'est souvent qu'une ruse de l'hypocrisie pour masquer la haine ou la crainte ; moi, j'aime le doux soupir, alors que les yeux, ces voix de l'âme, sont un moment obscurcis par une larme.
Quand l'amitié ou l'amour éveillent nos sympathies, quand la vérité devrait apparaître dans le regard, les lèvres peuvent tromper avec une grimace et un sourire ; mais le signe d'affection le plus infaillible, c'est une larme.
L'oisiveté est la source de tout mal.
La poésie est la conscience d'un monde passé et d'un monde à venir.
On se presse d'aimer, puis on se déteste à loisir.
Aucun soupçon jaloux ne fait palpiter un cœur.
La certitude n'existe pas, c'est là encore un fait positif autant qu'aucune autre condition de l'humanité. Nous savons si peu ce que nous faisons en ce monde que je doute que le doute lui-même soit un doute.
Une agitation secrète mène ces âmes qui ne peuvent être contenues dans un cercle étroit, et qui vont toujours au-delà des bornes de la modération. Embrasées de ce feu, toujours plus difficile à éteindre, elles sont tourmentées de la soif des dangers et ne se lassent que du repos, fièvre du cœur fatale à tous ceux qu'elle dévore ! Les ambitieux ne respirent que l'agitation, et leur vie est une tempête qui les a élevés dans les airs pour les laisser enfin retomber sur la terre; mais ils sont tellement accoutumés à cette vie orageuse, que si, survivant aux périls qu'ils ont affrontés, ils voient succéder le calme du crépuscule à leur jour brillant de périls, ils se sentent accablés par le chagrin et meurent de langueur comme un feu qu'on néglige d'entretenir et qui ne jette plus que quelques flammes vacillantes, ou comme une épée dont la rouille s'empare et qui se consume elle-même sans gloire.
Cesse de sourire à ce front soucieux. Hélas ! je ne puis te rendre ton sourire ; fasse le ciel cependant que tu ne connaisses jamais les larmes ! fasse le ciel que tu n'en répandes jamais en vain !
Le cœur ne connaît ni temps ni distance.
La renommée est la soif de la jeunesse.
Les choses de ce monde sur lesquelles le temps a laissé l'empreinte de ses pas sont animées d'une espèce de sentiment, mais les édifices à demi ruinés par ses coups et sur lesquels s'est brisée sa faux destructive, sont surtout revêtus d'un charme magique et bien supérieur à la pompe de ces somptueux palais qui attendent encore le vernis des âges.
La jeunesse fuit, la vie tombe en ruine : l'espérance même nous abandonne ; nous n'avons plus le même culte pour l'amour ; il étend ses jeunes ailes et s'envole avec la brise, et le linceul de la tendresse est le dernier adieu de l'amour.
Rien n'est plus lourd à porter que l'orgueil solitaire.
Un sourire charme un amant, une larme le dissuade.
Que l'homme volage qui se rit des cœurs fidèles aille exhaler ses railleries parmi les insensés qui lui ressemblent.
Quand le sang parle, les parents devraient être amis.
Qui trop se hâte n'arrive pas toujours.
Ma vie est à son automne, les fleurs et les fruits de l'amour m'ont quitté ; le ver rongeur, le regret, me restent encore.
Je ne respire que pour toi, tu es tout dans tout pour moi.
Emplissons jusqu'au bord la coupe des plaisirs ; enivrons-nous de sa liqueur, notre nectar.
La vieillesse est un temps où le souvenir attristé contemple d'une larme les souvenirs de la jeunesse.
Si tu le peux, étouffe tes regrets ; que ta pensée ne se reporte pas vers les joies du passé.
Les roses de l'amour égayent le jardin de la vie.
L'amitié ne brûle pas de feux que rien ne peut éteindre.
Un fol enthousiasme n'est qu'une ivresse morale.
Cède doucement, quand la pression est trop forte ; pour ce qui est de ta conscience, apprends seulement à l'aguerrir.
II n'est pas donné aux mortels de commander le succès.
Quand l'âme est malade, rien ne peut la guérir.
Le mariage vient de l'amour, comme le vinaigre du vin ; c'est un breuvage de tempérance, peu agréable et âpre, à qui le temps a fait perdre son céleste bouquet, pour le transformer en boisson de ménage, insipide et commune.
Dans la vie de l'homme, l'amour est un épisode ; pour la femme, c'est toute l'existence.
S'il est vrai que nous ne puissions retenir un soupir en quittant ceux avec qui nous sommes brouillés, il est naturel que nous pleurions ceux qui nous sont chers ; c'est-à-dire jusqu'à ce que des douleurs plus grandes viennent glacer les larmes dans nos yeux.