Mieux vaut lire deux fois un bon ouvrage qu'une fois un mauvais.
Il en est de la plaisanterie comme de la musique : un peu fait plaisir, quand elle est bonne ; davantage fatigue; et ces deux divertissements, trop prolongés, excèdent.
Une louange sans délicatesse répugne même celui qui en est l'objet.
Le style est à la pensée ce que la physionomie est à la figure.
L'exagération dans les discours révèle la faiblesse, comme le charlatanisme décèle l'ignorance.
La musique dépourvue de chant n'est que du bruit qu'on fait en mesure.
Les gens d'esprit ne doivent pas être les échos des sots. C'est d'échos en échos que la vérité descend sur le vulgaire.
La franchise est une des qualités qui déplaît le plus aux esprits médiocres.
Tout peut se dire ; seule la manière de s'y prendre fait tout passer.
Quand l'imposture règne, la simple vérité est séditieuse.
Les voleurs craignent les réverbères ; les usurpateurs et les tyrans les brisent.
En affaires, l'essentiel est de prendre un parti, quel qu'il soit.
Le cachet de la médiocrité, en tout genre, est de ne savoir pas se décider.
La galanterie, que je ne confonds pas avec l'amour, est un jeu où tout le monde triche : les hommes y jouent la sincérité, les femmes la pudeur, et chacun se trompe.
Les sens, la curiosité, la paresse et la vanité sont les quatre colonnes du temple de la galanterie.
N'employez pas votre argent à acheter un repentir.
Nul ouvrage n'est moins utile qu'un livre qu'on ne lit pas.
En écrivant ne portons pas de ces jugements que la postérité puisse infirmer. Plus on a de mérite, et plus il faut y prendre garde : si votre nom doit rester, la tache restera. Boileau du fond de la tombe ne peut plus effacer ce qu'il a dit de Quinault. Il faut surtout se défier de l'entraînement de l'opinion dominante au moment qu'on écrit : elle exerce toujours plus ou moins d'influence sur notre manière de sentir ; excepté chez les esprits très élevés, et qui voient au loin.
Le travail de l'homme a pour bornes ses facultés et sa volonté.
Quel plus affreux métier que celui de la guerre ! et qui fait tout dépendre de la force !
Toute la morale est dans ce vieux proverbe : Qui mal veut, mal lui arrive.
Les bonnes institutions d'éducation sont des semences pour l'avenir.
Le bonheur est de posséder des facultés, et de les exercer avec succès.
Il y a des personnes que le Ciel a douées d'une affection vive, sincère et dévouée.
L'estime est contagieuse, ainsi que toutes les autres affections de l'âme.
La seule noblesse que puisse reconnaître l'égalité politique est celle des lumières, la seule qu'on ne doive point au hasard et qui ne soit jamais la compagne de la médiocrité. Je ferai remarquer ce bon sens chinois qui fait de mandarin et de lettré deux mots synonymes, ne concevant pas que celui qui est placé plus haut par ses connaissances puisse être mis plus bas par son rang, et que la sottise et l'immoralité doivent jamais commander au génie et à la vertu.
La perversité fait le mal ; la faiblesse le permet ; l'ignorance y applaudit.
Il faut s'attendre à tout, hors à l'ingratitude d'un ami.
Si vous aimez la vie, ne perdez pas le temps, car la vie en est faite.
Tous les vices ouvrent la porte au repentir, hormis l'hypocrisie.
Il en coûte plus pour nourrir un vice que pour élever deux enfants.
Avez-vous une chose à faire demain ? Faites-la aujourd'hui.
Le bonheur véritable adoucit les mœurs qu'aigrit l'infortune.
Le bonheur véritable se compose non de plaisirs, mais d'une satisfaction soutenue et de tous les instants.
Les femmes sont rarement satisfaites de l'attachement que les hommes ont pour elles.
Quand on sait aimer et plaire, qu'il est doux d'aimer nuit et jour.
La jeunesse aime qu'on l'amuse.
Le vulgaire, c'est-à-dire presque tout le monde, reçoit ses opinions toutes faites.
Aime pour qu'on t'aime.
Les âmes élevées se mettent à genoux devant le mérite ; les âmes communes, devant le succès.
Les mauvais gouvernements sont enduits d'une espèce de glu à laquelle viennent s'attacher l'avidité, la délation, le mauvais sens, tous les vices.
L'ambition, comme la colère, conseille presque toujours mal.
Le temps éclaircit bien des questions, mais que d'opinions deviennent problématiques avec l'âge !
La vieillesse est la mère du doute.
La bonne compagnie a un mérite incontestable : c'est qu'elle vaut mieux que la mauvaise.
Il est bon de songer à soi : il est odieux de ne songer qu'à soi.
Aux yeux des courtisans une grande fortune compense la bassesse de l'extraction, l'absence de toute éducation et de toute délicatesse.
Pourquoi les arrêts de la postérité sont-ils presque toujours justes ? Les hommes à venir auront-ils un meilleur jugement que les hommes de ce temps ? Probablement non. Mais ils seront désintéressés dans nos affaires ; ils auront notre instruction et nos idées, et les leurs par-dessus. Ils seront plus âgés et plus expérimentés que nous qui le sommes plus que nos ancêtres ; car ce ne sont pas les Grecs et les Romains qui sont à présent les anciens, les vieillards : c'est nous autres. Enfin la postérité a l'immense avantage de juger après l'événement qui ne se trompe jamais. Aussi l'homme qui prévoit le mieux l'issue de chaque affaire, juge-t-il comme la postérité.
Peu de gens sont en état de donner de bons conseils, et moins de gens encore sont en état d'en recevoir.
C'est une chose qui m'a toujours semblé une insulte au public que ces discours d'apparat, où un orateur prononce en termes ronflants, le contraire de ce qu'il pense, devant une assemblée qui sait le contraire de ce qu'il dit. Expliquez-moi comment ce public imbécile peut digérer sans avoir l'air d'en être trop incommodé, des bassesses auxquelles il a l'air de prendre part, des mensonges qu'il ne peut contredire, et des sottises qu'il ne lui est pas permis de siffler.
Si quelque chose peut faire excuser le crime, c'est le besoin. On ne doit donc point d'indulgence à ces grands scélérats qui n'ont aucun besoin, pour qui le bien est si facile à faire, et qui font le mal.