La parfaite habileté et la scélératesse consommée sont incompatibles.
II est des écrivains à qui il ne manque pour être parfaitement naturels que de vouloir moins l'être.
Il est des gens à qui il est naturel de paraître affectés.
Il est des hommes à qui l'on fait croire tout ce que l'on veut, pourvu qu'on renonce à leur prouver qu'ils ne méritent pas d'être crus.
Un scepticisme outré est autant une maladie du cœur que celle de l'esprit.
II faut plus que de simples yeux pour bien lire dans le Livre du Monde.
Se vanter d'avoir du loisir n'est pas toujours connaître le prix du temps.
La plupart des beaux esprits font comme les romans, qui en connaît un, en connaît mille.
Il faut souvent plus que de l'esprit pour mériter le titre de bon, sans passer pour dupe.
Les gens d'esprit se trouvent si déplacés dans la compagnie des fats, qu'il arrive souvent aux premiers d'en contracter un air gauche, dont les seconds ne manquent jamais de se prévaloir.
L'esprit est comme le cœur, il n'est jamais connu lorsqu'il est hors de sa sphère.
Il en est de l'esprit comme des passions : ce n'est point lui qui nous décrédite, c'est l'abus que nous en faisons.
II faut être bon soi-même pour être touché de la bonté d'autrui.
L'imagination des femmes sert plus à fortifier leur coquetterie qu'à embellir leur jugement.
Le silence de la vanité est souvent pire que son langage.
On guérit de la vanité par la vanité même.
La bonté est une vertu qui a souvent besoin des occasions pour s'accroître.
Il n'est rien de plus contraire à l'honneur que l'amour des honneurs.
Un trait de générosité est une sorte d'affront fait à l'orgueil de celui qui en est l'objet.
Les vrais honnêtes gens sont les plus faciles à tromper et à détromper.
Une extrême modestie est l'écueil de certains talents.
La modestie des femmes est l'écueil le plus infaillible de la vertu des hommes, parce que c'est celui dont ils se défient le moins.
La modestie de certains hommes est souvent en proportion de leur politique, ou de leur faiblesse.
Rien n'est plus contraire aux lois de la véritable politesse que d'en donner des marques à ceux qui n'en ont que l'écorce.
II n'est point de véritable politesse sans liberté.
On est quelquefois d'autant plus civil que les mœurs sont moins honnêtes.
Il s'en faut de beaucoup que tous ceux qui sont civils soient polis.
La complaisance tient à tous les caractères, et n'en adopte aucun.
On ne connaît la vérité qu'en lui cédant.
La noblesse est à la vertu ce que l'esprit est à la beauté.
L'estime des hommes ressemble aux vêtements : elle s'use, et a besoin d'être renouvelée.
Le génie tient les rênes de l'imagination, l'esprit les laisse aller.
On ne raisonne guère sans passion que lorsque les autres en paraissent dépouillés.
II est souvent plus essentiel qu'on ne pense de cultiver les grâces de l'imagination pour donner du lustre à la solidité du jugement.
L'imagination est de trop pour voir les choses telles qu'elles doivent être vues.
Un homme né timide pêche presque également par un excès de mauvaise opinion, et de soi, et des autres.
II est des faiblesses que la nature permet aux femmes qu'elle ne pourrait leur reprocher sans injustice parce qu'elles doivent leur naissance au défaut de principe qui est commun à leur sexe.
II n'appartient qu'aux âmes du premier ordre de sentir autant de plaisir à recevoir qu'à donner.
L'éloquence est une un don et une magie naturelle.
L'abondance de nos idées semble nous faire souhaiter que nos sens se multiplient.
Ce qu'on appelle subtilité d'esprit n'est souvent qu'une incapacité singulière de penser solidement.
Il suffit quelquefois d'être né pénétrant pour ne pouvoir s'empêcher être pénétré.
Celui qui ne peut se déterminer à croire, lorsqu'il n'y a pas d'autre parti à prendre, ignore quand il faut douter.
Le penchant au pyrrhonisme ne met point de différence entre le vraisemblable et le vrai.
Le temps qui affaiblit un amour malheureux fortifie l'amitié qui en achève la guérison.
Céder au temps n'est pas toujours savoir saisir les occasions.
Deux grands ennemis l'un de l'autre, l'Amour et le Temps.
Ceux qui savent lire dans les têtes en savent plus que la plupart des livres n'en peuvent apprendre.
Toute occupation, dont le seul but est de rendre aimable, rétrécit nécessairement le génie.
On ne s'occupe ordinairement à cultiver les facultés de son âme que lorsqu'on en a usé les ressorts, et que la machine vaut à peine les frais d'une réparation.
II y a encore quelque chose de plus grand que le don de penser, c'est le courage de taire ce qu'il est glorieux de savoir, et ce qu'il est dangereux d'apprendre.
L'impuissance de penser devient souvent le malheur de ce petit nombre d'hommes qui s'en sont fait la triste et unique occupation de leur vie.
De la délicatesse au raffinement, il n'y a qu'un pas.
II faut souvent moins d'esprit pour faire des dupes que pour le devenir.
L'esprit recueille quelquefois tout seul les profits qu'il doit à la corruption du cœur.
Les talents agréables sont des amis, et les talents utiles des ennemis.
Du partage inégal des talents, il résulte que le vœu de la nature est que les hommes s'unissent par les liens de la société.
Il faut paraître ignorer son habileté pour devenir encore plus habile.
La démangeaison de passer pour être un homme habile empêche souvent de le paraître.
L'homme le plus habile est celui qui ne se pique de rien, pas même de passer pour être ce qu'il est en effet.
Les ressources de l'habileté sont d'un si grand prix qu'une seule occasion, saisie ou négligée, suffit pour former, augmenter, diminuer, détruire, ou rétablir notre réputation.
On s'éloigne des règles de l'habileté par l'habitude d'une uniformité constante dans ses actions.
Il est d'un homme habile de faire quelques fautes légères pour faire prendre le change sur son habileté.
Le plus habile de tous les hommes n'a pas trop de son habileté pour réparer les fautes de son imagination.
La finesse du sentiment est souvent un bon mot auquel la philosophie n'a rien à répliquer.
Le nombre des mauvais écrivains ne serait pas si considérable, si celui des mauvais critiques pouvait diminuer.
La plupart des écrivains sont comme les femmes à la mode, toujours appréciés au-dessus ou au-dessous de leur juste valeur.
S'il faut souvent avoir plus que de l'esprit pour bien écrire, il faut souvent avoir plus que du goût pour bien juger d'un ouvrage de génie.
Rien n'est plus rare que la vraie bonté, parce que rien n'est plus rare qu'un parfait discernement.
La curiosité suppose quelquefois autant de besoins dans le cœur que dans l'esprit.
Avec de la persévérance et un travail assidu un esprit juste sans être étendu peut aller aussi loin que le génie.
On prend quelquefois pour épuisement de la raison la satiété du cœur.