Je suis un enfant des montagnes et de leurs hauts sommets.
Titre : Je suis un enfant de la montagne.
Recueil : Les poésies et sonnets d'un voyageur (1844)
La nuit descend, le ciel est sombre,
Des nuages épais entourent l'horizon ;
On n'entrevoit au loin dans l'ombre
Que les pics escarpés et le bord du vallon.
On n'entrevoit que la cascade,
Où la lune parfois jette un rayon douteux,
Comme l'espoir qu'un cœur malade
Voit apparaître encor dans ses jours orageux.
Dans les montagnes le vent gronde ;
Sur les rocs le sapin se courbe en gémissant,
Et le torrent qui les inonde
De sa chute fougueuse étonne le passant.
Ici le bruit du monde cesse,
Les frivoles désirs, l'inutile souci,
Et l'orgueil avec sa tristesse,
Et les vaines rumeurs disparaissent ici.
Tout ce que le regard embrasse,
Bois profonds, pics aigus, bords du lac au flot bleu,
Tout dans ce large et grand espace
Ramène la pensée à la nature, à Dieu.
Je suis un enfant des montagnes,
Et quand je puis revoir du haut de leurs sommets
Les forêts vertes, les campagnes,
Je sens renaître encor les songes que j'aimais.
Je sens l'aile rafraîchissante
De mon ange gardien qui se penche sur moi ;
J'entends sa douce voix qui chante,
Je reviens à mes jours d'espérance et de foi.
Xavier Marmier (1808-1892)