La plaie ardente d'un amour, d'Émile Augier.

Titre : La plaie ardente d'un amour.

Recueil : Les sonnets et poésies complètes (1852)
Je n'ai pas soif, vieillard, merci.
Mon cœur a bien autre souci
Que la bouteille !
Toi, cependant, paisible et gai,
Tu bois à l'ombre, à petit gué,
Sous une treille.

Tu ris au gobelet d'étain,
Et nul d'un jugement certain
Ne pourrait dire
À voir tes regards complaisants,
Qui creusa tes rides, des ans
Ou du sourire.

Tu n'as pas connu même un jour
La plaie ardente d'un amour
Mis en risée,
Ou si tu l'as eue à vingt ans,
Du moins l'as-tu depuis longtemps
Cicatrisée.

Ô vieillard, que je donnerais
Mes cheveux noirs et mon sang frais,
Et ma jeunesse,
Pour m'être acquitté de souffrir,
Et comme toi, près de mourir,
Boire en liesse !

Guillaume-Victor-Émile Augier (1820-1889)
Précédent Accueil Suivant
Top