Titre : La rose dure le temps d'un adieu.
Recueil : Les poèmes et sonnets mystiques (1886)
Tu te demandes pourquoi la rose vit si peu ?
La rose éclot, fugitive, à peine sur la terre ;
Elle brille, un moment, dans ton heureux parterre ;
Elle dure un sourire, un regard, le temps d'un adieu.
Puis la rose s'abandonne à la grâce de Dieu ;
Le soir a fait pâlir sa jolie couleur passagère,
Et fane en moins de rien sa corolle légère,
Elle a perdu sa grâce et son charme, et son feu.
Ah ! c'est qu'elle est en proie aux amoureuses fièvres,
L'amour va consumant les pourpres de ses lèvres ;
C'est son ardeur ainsi qui la hâte au tombeau.
Dans un dernier désir la rose exhale son âme,
Elle brûle sans cesse, éphémère flambeau ;
Ce n'est pas une fleur qui meurt, c'est une flamme.
Jacques Villebrune