Titre : Le Bassin d'Arcachon.
Recueil : Les heures d'un prisonnier (1869)
Qu'il est doux d'habiter cet agreste rivage,
Ce beau lac de la mer où le flot est si pur !
Où le joyeux poisson et le frais coquillage
Se laissent mollement porter de plage en plage
Par la vague d'azur !
Qu'il est doux de voir fuir ces légères nacelles,
Ces barques de pêcheurs s'inclinant sous le vent,
Et quand le ciel est calme et que les eaux sont belles,
D'y voir passer dessus l'ombre des blanches ailes
Du léger goéland !
Qu'il est doux, chaque soir, quand commence la brune,
De parcourir ces bords toujours silencieux,
Voir le flot scintiller aux rayons de la lune,
Et contempler le phare, aussi beau sur sa dune
Qu'une planète aux cieux !
Qu'il est doux, le matin, quand Phébus veut paraître,
De voir ses feux dorer les établissements,
L'habitant qui, joyeux, en rouvrant sa fenêtre,
Fredonne un gai refrain, revoyant apparaître
Les signes du beau temps !
Qu'il est doux, quand la mer refoulant sa marée,
Recouvre de ses eaux les verdoyants crassâts,
De voir, dans le bassin, la troupe aventurée
Des baigneurs s'agitant dans une onde troublée
Par leurs joyeux ébats !
Ah ! ne me dites plus qu'on peut trouver en France
Des bains plus recherchés, des baigneurs plus nombreux :
Arcachon du bonheur est bien la résidence ;
Ses eaux et sa forêt sont pleines d'espérance,
Et font beaucoup d'heureux !
Jean Lacou (1821-1908)