Titre : Les amours tardifs ont peu d'espérance.
Recueil : Les poèmes et sonnets mystiques (1886)
On aime toujours ou bien trop tôt ou bien trop tard :
C'est en été surtout que la moisson est la plus belle,
Jeune, on se laisse prendre au rire d'une demoiselle,
Dupe d'un mot, d'un signe, un doux chant, un regard,
Et l'on aime partout, sans trêve, au pur hasard.
Vieux, nous ne croyons plus à l'amour éternelle,
Nous adorons sans foi la maîtresse immortelle ;
Ou nous aimons sans flamme, ou nous aimons sans art.
Le beau fruit de l'avril est fade et sans arome,
La pâle fleur d'août n'a rien qui nous embaume ;
À l'amour trop tardif il manque surtout l'avenir,
Trop précoce, l'amour n'est rien qu'une ignorance ;
Les amours du printemps n'ont point de souvenir,
Et les amours d'automne ont si peu d'espérance !
Jacques Villebrune