La poésie française sur la tristesse.

La poésie française sur la tristesse

Âme tourmentée et triste vie.

Il y a des pensées sans confident, il y a des tristesses qui ne se partagent pas. Il faut même par générosité les cacher. On rêve seul, on souffre seul, on meurt seul. (Henri-Frédéric Amiel)

2 - Les poèmes et sonnets sur la tristesse :

Poème : Tristesses de la lune.

Recueil : Les fleurs du mal (1857)
Ce soir, la lune rêve avec plus de paresse ;
Ainsi qu'une beauté, sur de nombreux coussins,
Qui d'une main distraite et légère caresse
Avant de s'endormir le contour de ses seins,

Sur le dos satiné des molles avalanches,
Mourante, elle se livre aux longues pâmemoisons,
Et promène ses yeux sur les visions blanches
Qui montent dans l'azur comme des floraisons.

Quand parfois sur ce globe, en sa langueur oisive,
Elle laisse filer une larme furtive,
Un poète pieux, ennemi du sommeil,

Dans le creux de sa main prend cette larme pâmele,
Aux reflets irisés comme un fragment d'opale,
Et la met dans son cœur loin des yeux du soleil.

Charles Baudelaire (1821-1867)

Poème : Tristesse.

Recueil : Les poésies nouvelles (1850)
J'ai perdu ma force et ma vie,
Et mes amis et ma gaieté ;
J'ai perdu jusqu'à la fierté
Qui faisait croire à mon génie.

Quand j'ai connu la Vérité,
J'ai cru que c'était une amie ;
Quand je l'ai comprise et sentie,
J'en étais déjà dégoûté.

Et pourtant elle est éternelle,
Et ceux qui se sont passés d'elle
Ici-bas ont tout ignoré.

Dieu parle, il faut qu'on lui réponde.
Le seul bien qui me reste au monde
Est d'avoir quelquefois pleuré.

Alfred de Musset (1810-1857)

Poème : Si les larmes servaient de remède au malheur.

Recueil : Les regrets (1558)
Si les larmes servaient de remède au malheur,
Et le pleurer pouvait la tristesse arrêter,
On devrait, Seigneur mien, les larmes acheter,
Et ne se trouverait rien si cher que le pleur.

Mais les pleurs en effet sont de nulle valeur :
Car soit qu'on ne se veuille en pleurant tourmenter,
Ou soit que nuit et jour on veuille lamenter,
On ne peut divertir le cours de la douleur.

Le cœur fait au cerveau cette humeur exhaler,
Et le cerveau la fait par les yeux dévaler,
Mais le mal par les yeux ne s'alambique pas.

De quoi donques nous sert ce fâmecheux larmoyer ?
De jeter, comme on dit, l'huile sur le foyer,
Et perdre sans profit le repos et repas.

Joachim Du Bellay (1522-1560)

Poème : J'ai dit à mon cœur.

Recueil : Les poésies nouvelles (1850)
J'ai dit à mon cœur, à mon faible cœur :
N'est-ce point assez d'aimer sa maîtresse ?
Et ne vois-tu pas que changer sans cesse,
C'est perdre en désirs le temps du bonheur ?

Il m'a répondu : Ce n'est point assez,
Ce n'est point assez d'aimer sa maîtresse ;
Et ne vois-tu pas que changer sans cesse
Nous rend doux et chers les plaisirs passés ?

J'ai dit à mon cœur, à mon faible cœur :
N'est-ce point assez de tant de tristesse ?
Et ne vois-tu pas que changer sans cesse,
C'est à chaque pas trouver la douleur ?

Il m'a répondu : Ce n'est point assez
Ce n'est point assez de tant de tristesse ;
Et ne vois-tu pas que changer sans cesse
Nous rend doux et chers les chagrins passés ?

Alfred de Musset (1810-1857)

Poème : La tristesse.

Recueil : Les poésies inédites (1860)
Si je pouvais trouver un éternel sourire,
Voile innocent d'un cœur qui s'ouvre et se déchire,
Je l'étendrais toujours sur mes pleurs mal cachés
Et qui tombent souvent par leur poids épanchés.

Renfermée à jamais dans mon âme abattue,
Je dirais : « Ce n'est rien » à tout ce qui me tue ;
Et mon front orageux, sans nuage et sans pli,
Du calme enfant qui dort peindrait l'heureux oubli.

Dieu n'a pas fait pour nous ce mensonge adorable,
Le sourire défaille à la plaie incurable :
Cette grâmece mêlée à la coupe de fiel,
Dieu mourant l'épuisa pour l'emporter au ciel.

Adieu, sourire ! Adieu jusque dans l'autre vie,
Si l'âme, du passé n'y peut être suivie !
Mais si de la mémoire on ne doit pas guérir,
À quoi sert, ô mon âme, à quoi sert de mourir ?

Marceline Desbordes-Valmore (1786-1859)

Poème : Chanson d'automne.

Recueil : Les poèmes saturniens (1866)
Les sanglots longs
Des violons
De l'automne
Blessent mon cœur
D'une langueur
Monotone.

Tout suffocant
Et blême, quand
Sonne l'heure,
Je me souviens
Des jours anciens
Et je pleure

Et je m'en vais
Au vent mauvais
Qui m'emporte
Deçà, delà,
Pareil à la
Feuille morte.

Paul Verlaine (1786-1859)

Poème : Les malentendus.

Recueil : Il penseroso (1858)
Tristes malentendus, chagrinants sortilèges,
Vous faites de la vie un labyrinthe affreux :
Les cœurs qui s'appelaient, abusés par vos pièges,
Cessent de se comprendre et s'évitent entre eux.

Henri-Frédéric Amiel (1821-1881)

Poème : Quand triste est le présent.

Recueil : Jour à jour, les poésies intimes (1880)
Quand sur chaque sentier l'impossible se dresse,
Quand le sort a dit non, quand projets et travaux
N'amusent plus un cœur que tout agite ou blesse,
Et que pour tout bonheur on a le choix des maux ;

De tout riant espoir lorsque notre âme est veuve,
Quand triste est le présent, lugubre l'avenir ;
Quand l'existence est morne et s'allonge en épreuve,
Et que l'on ne fait plus qu'un souhait, en finir ;

Alors, pour éviter et le dégoût suprême
Et la sombre apathie et la soif de la mort,
Quel moyen reste ? Ami, songer à qui nous aime
Et pour nous veille et prie et nous voudrait plus fort.

Henri-Frédéric Amiel (1821-1881)

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